Dimanche, 19 mars 2023, jour où seulement quelques heures ont été nécessaires, sous la pression des marchés financiers, pour mettre à mort un établissement bancaire de renommée nationale et internationale (Credit Suisse), restera assurément un jour très sombre pour notre place financière. En Suisse, en moins d’un siècle, nous sommes passés de huit grandes banques à une seule. Pour le pays et pour notre image en général, la débâcle du Credit Suisse marque un avant et un après.
Les questions fusent: avec une ligne de crédit illimitée de la part de la BNS, n’était-il pas possible de sauver la banque et montrer aux marchés que tout le pays était derrière elle? Suspendre la cotation boursière de l’action—le temps nécessaire pour un retour au calme—aurait pu être envisagé.
Comment cela se fait-il que le mercredi précédent (communiqué commun) la BNS et la FINMA nous assuraient que l’établissement était solidement capitalisé?
Qu’adviendra-t-il des 50’000 employés? Qu’en est-il de la responsabilité du régulateur et des auditeurs? Et le volet politique?
Notre souveraineté, a-t-elle été une nouvelle fois bradée au profit de nos compétiteurs? D’où venaient les attaques, diffamations, rumeurs et fausses nouvelles diffusées, entre autres, sur réseaux sociaux dès octobre 2022 à l’encontre de la banque (ceci révélé par la présidente du conseil d’administration de la FINMA Marlene Amstad et confirmé en Assemblée générale, à Zürich, mardi 4 avril 2023, par Ulrich Körner, CEO)? À ce propos, une plainte pénale sera-t-elle déposée? Quid de la Loi sur l’infrastructure des marchés financiers (LIMF) du 19 juin 2015?
Autant de questions légitimes, aussi selon le Conseil du GSCGI, récemment réuni en séance de travail et occupé à défendre les intérêts de la branche. Nous, gestionnaires de fortune indépendants, sommes aux premières lignes pour protéger nos clients et la réputation de notre place financière. Dans le cas du Credit Suisse, compétence et une connaissance suffisamment approfondie du dossier auraient été nécessaires pour en évaluer l’état de crise.
Néanmoins, votre serviteur a participé à la dernière assemblée générale des actionnaires de la banque, le 4 avril 2023, qui s’est tenue à la Hallenstadion, à Zürich, Oerlikon, et a pris la parole afin de poser les questions relatives aux points évoqués plus haut. Concernant les manipulations de cours et le volet pénal, ils restent de la compétence de l’État et de la justice, a souligné le président du CDA de Credit Suisse, Axel Lehmann. Pour leur part, les investisseurs ne l’entendent pas de cette façon: le «20min.ch» nous apprend que Migros porte plainte contre la FINMA, des investisseurs de Singapour souhaitent porter plainte contre les autorités suisses nous rapporte la «RTS», et le cabinet d’avocats Kessler Topaz Meltzer & Check a porté une plainte collective pour tromperie auprès du tribunal de district de New Jersey, relatait le «Blick.ch» le 6 avril dernier.
Quant aux gérants indépendants et particulièrement les Membres du GSCGI, nous accompagnerons nos clients au plus près de leurs intérêts. Nous sommes conscients qu’il nous appartient d’œuvrer dans l’excellence pour restaurer la confiance dans notre place financière. C’est aussi le but recherché par le législateur avec l’introduction des lois financières LSFin-LEFin. Elles visent l’excellence. Les retours se font sur ce plan. Les derniers contrôles LBA, encore sous le régime des Organismes d’autorégulation (OAR), se révèlent plus pointus. Ils sont déjà à mi-chemin du contrôle prudentiel, qui sera pratiqué dès l’année prochaine. Désormais, il devient essentiel que tous les faits significatifs, relevant de la bonne et fluide organisation du gérant indépendant, soient documentés. Par exemple, un contrôle au SECO, concernant d’éventuelles sanctions prises à l’égard d’un client ou d’un prospect, doit laisser une trace écrite, car tout ce qui n’est pas documenté est considéré comme non-fait. Dans cette constellation, il est judicieux de bien s’entourer et de travailler en réseau. L’affaire Credit Suisse est loin d’être terminée mais nous, gérants indépendants, oeuvrons pour restaurer l’orgueil de notre place financière qui demeure unique au monde.
Francois Meylan — Editorial paru dans The IFA’s Wealth Gram, la tribune mensuelle du GSCGI